Lettre de NASSER ZEFZAFI Parlement européen 2018

Amazigh Informatie Centrum
6 min readDec 16, 2018

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photo: N. Adherbal

Lettre de NASSER ZEFZAFI lue par son père, M. AHMED ZEFZAFI
CONFERENCE DE PRESSE
Parlement européen
Strasbourg | 11 décembre 2018
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Tout d’abord, je tiens à souligner qu’il s’agit d’une lettre de NASSER ZEFZAFI, qui est détenu au Maroc, et je ne fais que la lire en son nom.

Mesdames et Messieurs, les députés du Parlement européen et chers participants. En tant que rifain et sur la base des valeurs qui m’ont été inculquées les valeurs de ma famille et de la société rifaine dans laquelle j’ai grandi, je voudrais saluer à M. OLEG SENTSOV lauréat du Prix Sakharov pour la liberté de pensée 2018, décerné par le Parlement européen. Je souhaite également qu’il soit libéré car l’amertume de l’emprisonnement n’est connue que de ceux qui l’ont essayé et passés par là comme moi.

Mesdames et Messieurs, je voudrais adresser mes remerciements les plus sincères et les remerciements et mon estime, l’estime d’un activiste détenu de manière injuste en raison de son implication dans le Mouvement populaire dans le RIF. Le mouvement rifain qui a été l’objet d’admiration de tous les peuples et dans tous les continents Je m’incline également devant le respect à tous les peuples européens, députés européens ceux qui ont voté pour moi et ceux qui ont voté pour ma candidature mais aussi les autres, j’aurais souhaité les prendre dans mes bras pour les remercier. Ce sont ceux qui ont été mentionnés à plusieurs reprises par mon père lors de sa visite en prison, notamment:

- Kati PIRI
-Kathleen VAN BREMPT
-Marie-Christine VERGIAT
-Judith SARGHENTINI
-Pascal DURAND
-Bodil VALERO
-Miguel URBAN
-Lola SANCHEZ
-Ana MIRANDA

Je m’excuse si j’en ai oublié d’autres personnes

Mesdames et messieurs, je vais essayer, très brièvement de décrire la situation dans laquelle j’ai été arrêté. Je suis originaire du RIF , au nord du Maroc. Ce RIF a souffert, souffre et souffrira à cause de la marginalisation permanente qui est délibérément imposée ce qui aboutit à la pauvreté, le chômage, l’analphabétisme. Lorsqu’un habitant de cette région proteste contre cette situation, l’État intervient de manière barbare par l’intermédiaire de son armée, de la gendarmerie, des auxiliaires et de la police. Cela s’applique lorsque nous parlons des opérations répressives récentes. en 1818 toute tribu complète a été exterminée dans la province d’Al Hoceima. En 1908, nous avons eu des mesures de répression que nous avons subis. En 1958, la province d’Al Hoceima a connu la perquisition et des confiscations de terrain et un décret royal a été imposé au RIF, dans lequel la province d’Al Hoceima a été déclarée zone militaire le 24 novembre 1958, un décret toujours en vigueur à ce jour. Cette année-là, l’armée a saisi toutes sortes d’armes utilisées pour commettre des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité dans la région : meurtres en masse, viols à grande échelle, ventre de femmes enceintes déchirées, maisons démolies ses habitants, des biens pillés et des vergers incendiés. Nous ne devons pas oublier le massacre de 1984. En 2011, 5 jeunes ont été tués dans un commissariat, après quoi leurs corps ont été placés de manière stratégique dans la bâtiment abritant la banque et leurs corps brûlés.

Dans ce contexte de faits criminels systématiques, le marchand de poisson, Mohcine FIKRI a été broyé dans une benne à ordure le 28 octobre 2016. Cela a conduit à l’émergence d’un mouvement populaire dont l’épicentre se trouve à Al Hoceima, puis a atteint tous les endroits du RIF par le biais de manifestations et de marches de protestation pacifique. Cela a été démontré par des manifestants portant des bougies et des fleurs et entourant les marches de protestation par des chaînes humaines pour protéger les bâtiments du gouvernement et les propriétés privées, puis en laissant l’espace public après la manifestation. L’un des plus beaux gestes des manifestants fut le partage de la nourriture entre les manifestants et les forces de l’ordre

À ce moment-là, j’ai appelé lors des marches de protestation et des sit-in à mettre en œuvre le cahier des charges comprenant trois composantes principales : une université, la construction d’un hôpital spécialisé dans le traitement du cancer et la création des opportunités de travail . J’ai également appelé à la lutte contre la corruption, au respect des droits de l’homme, la lutte contre l’immigration clandestine et instaurer la justice sociale”.

J’ai également appelé à la consolidation du statut de la femme du RIF, qu’elle est connue depuis des siècles. Parce que la femme rifaine mérite tout le respect notre attention et nos soins.

Une salutation militante à la grande femme rifaine dont j’embrasse respectueusement le front, car elle était présente toujours en grand nombre lors de nos manifestations et marches du mouvement populaire et pacifique du RIF et qu’elle symbolisait le respect des rifaine.

Nous avons marché dans des marches pacifiques et avons demandé la mise en œuvre de l’ensemble de nos droits. 7 mois plus tard, le 26 mai 2017, la réponse de l’État est venue répéter les mêmes actions répressives susmentionnées. Cela a commencé avec la perquisition de ma maison, en mon absence, de façon barbare par la police qui brisé la porte extérieure. Cet acte était sans mandat légal pour attaquer ma mère, puis celle-ci a perdu connaissance et mon père a dû être transféré à l’hôpital.

Les agents de police ont continué à fouiller la maison et ont vérifié chaque objet comme s’ils cherchaient quelque chose sans savoir quoi, mais ils n’ont rien trouvé. Ils ont complètement retourné mon domicile qu’ils semaient le chaos dans la maison. Après cela, les raids ont commencé sur les maisons des autres militants et les enlever dans leurs lits. Certains sont nus devant les yeux de leurs femmes et de leurs jeunes enfants. Le nombre total d’arrestations a dépassé le millier. La plupart d’entre eux ont été jugés à Al Hoceima, puis répartis dans les prisons de tout le pays. Cela a causé de terribles souffrances aux familles des détenus lors de leurs visites et les souffrances de ces familles souvent pauvres continuent à ce jour.

Le 29 mai 2017, j’ai été enlevé d’un endroit sur la côte après que la région ait été assiégée par des navires de guerre, des hélicoptères militaires et des véhicules militaires accompagnés d’un grand nombre de soldats lourdement armés. Tout cela pour arrêter un homme désarmé.

Ici, j’ai été soumis aux pires formes de torture, battu avec des objets tranchants, des objets en métal , ce qui a entraîné un saignement important. J’ai également été soumis à la torture physique, verbale et morale et à la forme de torture la plus extrême : le viol. Tout cela s’est passé quand nous étions encore à terre. La violence s’est poursuivie dans les airs, alors que j’étais transporté à bord d’un hélicoptère d’Al Hoceima vers Casablanca, à 620 km. Pendant que je saignais abondamment et que ma tête était couverte. 50 agents m’ont torturé à tour de rôle. Dans le bureau de la Brigade Nationale de la Police Judiciaire, les policiers m’ont filmé nu et publié cette vidéo. Un scandale dont l’auteur reste libre.

Ensuite, ils ont formulé de graves accusations à mon encontre de peine de mort.

Ensemble avec mes 52 codétenus , nous avons eu un simulacre de procès pendant 7 mois. Au cours duquel, j’ai été emprisonné pendant 15 mois dans un endroit invivable, même pour les animaux les plus endurcis. Finalement, j’ai été condamné à 20 ans de prison. Pourquoi? Parce que j’ai eu le désir de m’éveiller un jour dans un monde sans bras, où les frontières seraient levées et où l’humanité jouirait d’une prospérité d’un bien-être véritable. Aujourd’hui, j’ai été réveillé par le bruit du geôlier qui me rappelle que je vais passer les 20 prochaines années derrière les barreaux, mais néanmoins, j’appelle toutes les braves du monde à lutter pour ce rêve qui ne me quitte pas même dans ma cellule obscure

Je voudrais vous remercier

NASSER ZEFZAFI

Traduction : Rachid Oufkir

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